La religion oubliée

Les druides, ces êtres mystiques aux pouvoirs ancestraux qui fascinent et intriguent, existent toujours.
Ils sont là, parmi nous. Du folklore à la prétendue reconstitution historique, il y a de quoi s’y perdre.
Et puis, il y a ceux pour qui c’est une religion, un sacerdoce. Ils vivent le druidisme comme d’autres sont catholiques ou musulmans. Ils sont en lien avec les différentes divinités et se connectent à elles en tout lieu, en tout temps. C’est à la rencontre de ces druides des temps modernes que ce travail documentaire est voué. Leur lien à la nature est omniprésent bien qu’ils le définissent comme un lien au vivant. Tout ce qui vit a la même importance. Ainsi, ils ne prient pas la nature, mais des divinités qui l’incarnent. Leur croyance teinte toute leur démarche et font d’eux des êtres profondément respectueux du vivant. A l’heure où l’environnement est omniprésent dans les discours, les druides d’aujourd’hui vivent leur quotidien en harmonie avec lui.
Là où la terre finit en se jetant dans l’océan Atlantique, l’Ordre druidique de Dahut se réunit pour célébrer l’équinoxe d’automne et saluer Bélénos, maître des étoiles qui disparaît lors de l’entrée dans la saison sombre. Le lendemain, sa parèdre « la très brillante » Belisama est célébrée pendant la nuit de pleine lune. Cette cérémonie intimiste réunit les plus fidèles de l’Ordre. Entre offrandes, chants, prières et rituels, ces cérémonies interpellent sur ce que chacun vient y chercher. Comme dans chaque religion, les espoirs, croyances et attentes sont variés autant pour les officiants que pour les fidèles. Entre mythes et imaginaire collectif, ces religieux druidiques là sont bel et bien réels et choisissent d’assumer leur croyance, mais surtout de la vivre.
Pour eux, il n’existe ni bien, ni mal, seulement la notion de ce qui est juste. Le choix de chacun est primordial dans la vie quotidienne comme dans la croyance. Rien n’est imposé, pas de livre sacré, aucun écrit sur lequel s’appuyer, seulement une invitation à venir ressentir et vivre à leur coté, guidé par leurs connaissances acquises par le vécu, une expérience de « reliance ». Pour Yavanna et Taliesin, fondateur de l’Ordre Druidique de Dahut, il n’est pas question d’imposer, mais plutôt de comparer, de venir ressentir la présence des divinités.
C’est ainsi qu’ils ont avancé sur leur chemin de croyant. En comparant leur expériences, en discutant, en remettant en cause leurs idées pré-conçues sur le druidisme, les celtes, les mythes et les légendes. Ainsi délestés de leur à-priori après un long travail de déconstruction (qu’ils continuent encore aujourd’hui), ils construisent leur communauté. Rejoint par des fidèles présents depuis des années pour certains, l’Ordre grandit et accueille aujourd’hui de nouvelles cheminantes sacerdotales. Le druide, érudit et scientifique par définition, est loin d’être coupé de la réalité et du monde moderne. Ainsi ils fondent l’association Arentelle pour supporter leur démarche et tenter d’en vivre ; A travers les réseaux sociaux, les lives, la guidance, la reliance animale... Yavanna et Taliesin s’ancrent dans la réalité actuelle. Ils vivent leur vie de famille rythmée par les cérémonies et les moments habités par leur divinité respective. Tous les membre de l’ODD (Ordre Druidique de Dahut) n’ont pas un métier en lien avec leur croyance, mais chaque cheminante rencontrée octroie une place importante à sa croyance dans son quotidien : que ce soit à travers l’art onirique tel que le fait Saomma, nouvelle cheminante assistante, ou encore Sophie, qui a prit un travail à horaire décalée pour pouvoir la journée cheminer, méditer et tenter une reliance plus forte avec les divinités. Devenir ovate (l’équivalent des prêtres gaulois, relié à toutes les divinités) est pour cette dernière une épreuve de fond. Elle doute, elle craque mais continue car au fond d’elle, elle est persuadée que sa place est là. Pour Saomma, ses rêves la guident pour graver ses bijoux. D’un naturel souriant et ouverte, elle prend avec beaucoup de recul et de dérision les codes trop strictes qui nourrissent les guerres de cloché druidique, chamanique, néo-paganique, rétorquant « qu’on a sûrement bien plus en commun que de choses qui nous opposent ».  Sans preuve, sans matérialisation, sans structure pour les soutenir, les druides d’aujourd’hui avancent à tâtons mais avancent comme guidé par une force extérieure.